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Titien occupe un des sommets de la peinture de la Renaissance. Sa longue vie (env. 1488-1576) lui a permis de déployer une activité picturale qui couvre les trois premiers quarts du XVIème siècle. Sa carrière est essentiellement liée à Venise, dont la tradition picturale est basée sur la couleur - c'est à dire sur la peinture et sur l'acte de peindre - plutôt que sur le dessin. Celui qui sera le peintre le plus célébré de son temps enrichit la tradition vénitienne de puissantes composantes expressives qui en renforcent le naturalisme et évite tout maniérisme. Son empreinte marque les plus grands peintres du XVIIème siècle comme Velásquez et Rubens et a des retentissements jusqu'à l'impressionnisme. Après quelques rudiments de métier acquis chez de petits peintres, le jeune Titien se nourrit de l'enseignement des artistes les plus modernes, Giovanni Bellini et Giorgione. L'élève surpassera ses maîtres. En 1514, Titien obtient la charge de courtier au Fondacio dei Tedeschi de Venise, qui équivaut au titre de peintre officiel de la fastueuse cité-état. Il devient alors, et pour longtemps, le portraitiste des princes, fournisseur attitré des puissants du monde, qu'ils soient rois, pape ou empereur. Brillant et habile, le peintre opère une synthèse maîtrisée de plusieurs genres. Dans ses grandes compositions, la perfection de ses portraits, comme animés, ajoutent à la véracité des personnages qui semblent saisis sur le vif ; la hardiesse de ses compositions basées sur l'asymétrie – et qui, souvent, tiennent compte du lieu pour lequel le tableau est destiné- insuffle rythme et mouvement à l'ensemble. Ses paysages très expressifs, loin d'être de simples décors, ajoutent à l'intensité dramatique et rendent vraisemblables les scènes narratives, souvent baignées d'un sentiment d'élévation propre au religieux. Tout les éléments sont en cohérence et tendus vers une participation à l'action. Même les objets inanimés rayonnent, comme habités d'une présence mystérieuse. Une forte puissance psychologique fait vibrer la peinture de Titien, jusqu'à parvenir à rendre "l'art plus fort que la nature" : la devise que Titien s'était choisie. Sur le tard, poussant jusqu'à la perfection l'art du colorito vénitien (où la couleur prime sur le dessin), il développera un style libre lié à une maîtrise parfaite de la peinture en tant que matière. Sa façon de poser la pâte colorée sur une toile infléchira le cours de l'histoire de l'art, et quelques siècles plus tard, inspirera Monet, Cézanne, et une poignée d'autres jeunes peintres révolutionnaires. Bernard Poupon |
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![]() Titien : l'art plus fort que la nature par David Rosand (Gallimard découvertes, 1993) Le Siècle de Titien : l'âge d'or de la peinture à Venise catalogue de l'exposition, Grand Palais, Paris, 9 mars-14 juin 1993 (Réunion des Musées Nationaux, 1993) Le Titien : questions d'iconologie par Erwin Panofsky (Hazan, 1990) ![]() Accès au catalogue général de la bibliothèque |