Vers 1975, on danse dans les rues du South Bronx, le pire ghetto des Etats-Unis : Kool Herc, jeune jamaïcain émigré à New York, a l’idée d’enchaîner sur deux platines jumelées les passages les plus déchaînés des morceaux de ses disques de funk, plutôt que de les passer tout entiers.

Quelques autres DJs perfectionnent la trouvaille et inventent de nouvelles techniques musicales : scratch, pass pass,… on en passe. Tandis que les DJs s’affrontent à coups de décibels, de disques rares et d’habileté aux platines, leurs compères MCs vantent leurs prouesses au micro et racontent des salades pour amuser la galerie. Le rap est né, quelque part dans les rues d’un New York où les touristes ne s’aventurent pas.

A partir de 1979 sortent les premiers disques. La parole y supplante rapidement la musique : les MCs, désormais maîtres à bord, décrivent la dure réalité du ghetto dans de longs poèmes urbains rudes et directs. Chantent-ils ? Déclament-ils  une poésie rythmique ? Récitent-ils ou improvisent-ils ? Car le peu d’intérêt pour la mélodie qui caractérise le style n’a d’égal que son goût pour les mots, le rythme, la scansion, et le phrasé souvent acrobatique. Le message s’affirme, le discours se politise et se radicalise (Public Enemy), regarde vers les racines africaines (Arrested Development), dans des textes dont la crudité évoque le blues et où la déclamation rappelle le gospel.

Le gangsta rap, en dépit de ses clichés, de ses excès et de ses thématiques douteuses, libérera entièrement la parole de toute autocensure, fera faire un bond de géant à la musique grâce aux avancées de quelques producteurs de talent… et générera des profits colossaux qui iront enfin enrichir des Noirs.

Plus proches des valeurs fraternelles du hip hop des débuts, quelques auteurs inspirés renoueront vers le milieu des années 90 avec des textes d’une grande valeur. D’autres, développant leur virtuosité, pousseront les platines, devenues instruments de musique, vers des hauteurs jamais atteintes. Ce goût pour l’expérimentation anime aujourd’hui une poignée d’explorateurs de nouveaux territoires musicaux, qui, flirtant avec les musiques électroniques, tissent depuis les années 2000 le renouveau d’un genre, qui n’a pas dit ses derniers mots.

Bernard Poupon
Mars 2005

Quelques disques essentiels :

SUGARHILL GANG - Rapper's delight (Sugarhill Records 1979)
AFRIKA BAMBAATA - Planet rock (Tommy Boy 1982)
GRANDMASTER FLASH & the FURIOUS FIVE—The Message (Sugarhill 1982)
RUN DMC— Raising hell (London 1986)
PUBLIC ENEMY—It Takes a Nation of Millions to Hold Us Back (Def Jam 1988)
N.W.A.—Straight Outta Compton (Ruthless 1988)
DE LA SOUL — 3 feet high and rising (Tommy Boy 1989)
ARRESTED DEVELOPMENT—3 years, 5 months and 2 days in the life of (Cooltempo 1992)
Dr DRE — Chronic (Death Row 1992)
SNOOP DOGGY DOGG — Doggy style (Death Row 1993)
WU TANG CLAN—Enter the Wu-Tang Clan (36 chambers) (Loud 1993)
2 PAC—All eyez on me (Death Row 1996)
The ROOTS — Things fall apart (MCA 1999)
MOS DEF—Black on both sides (Rawkus 1999)
DJ LOGIC—The Anomaly (Ropeadope 2001)
MISSY ELLIOTT— Under construction (Elektra 2002)
X-ECUTIONERS – Built from scratch (Loud records 2002)
ANTIPOP CONSORTIUM – Arrhythmia (Warp 2002)

Ces compacts sont disponibles à la discothèque
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Pour en savoir plus :

Quelques livres essentiels :


Olivier CACHIN – L’offensive rap (Découvertes Gallimard)
S.H. FERNANDO— The new beats :
culture, musique et attitudes hip-hop
(Kargo)
Christian BETHUNE—Le rap (Autrement)
Georges LAPASSADE – Le rap ou la fureur de dire (L. Talmart)


Quelques sites internet :

The Rap dictionary (en anglais)
The Original Hip Hop Lyrics Archive
Hip Hop Directory
Le Hip Hop