« Le blues, c’est faire avec le peu qu’on a et avec tout ce qu’on est."
P.J. Harvey


« 40 acres de terrain et une mule », un lopin de terre et de quoi la cultiver : c'est la promesse du Président Abraham Lincoln à chaque esclave noir américain, dès que le Nord des USA aura gagné la Guerre de Sécession. C’est chose faite en 1865, qui voit la défaite du Sud esclavagiste contre le Nord abolitionniste : dans la foulée, l’esclavage est aboli aux Etats-Unis, et les esclaves noirs américains deviennent des femmes et des hommes libres.
Pourtant, la promesse n’est pas tenue, le rêve d'intégration s'éloigne et les conditions de vie des Noirs s’améliorent peu : libres certes, mais sans ressources, dans des territoires – le Sud rural des plantations et du Delta du Mississipi – dont la population blanche leur est violemment hostile.

C’est dans ce contexte que le blues rural, ou blues du Delta, va peu à peu s’élaborer. Les paroles vont mettre en mots la détresse et les difficultés de la vie quotidienne, chantées par des musiciens s’accompagnant sur des instruments de fortune : guitares, harmonicas, kazoos,… Il n’est pas question de carrière musicale, et on chante souvent en groupe, entre amis ou en famille, et la musique, sous le signe de l'expressivité, redonne du coeur et de la force pour continuer à vivre. La gamme musicale employée est un étrange mélange de gamme occidentale et de gamme à 5 sons venue d’Afrique de l’Ouest.

Les difficultés économiques vont pousser de nombreux hommes à monter vers le Nord et ses grandes villes, comme Chicago, qui deviendra la capitale incontestée du blues électrique. Le blues va prendre ses quartiers dans les bars pauvres et fréquentés par des Noirs, où les musiciens s’accompagnent sur des guitares électrifiées dès les années 30 pour gagner quelques dollars : ils y chantent des histoires de solitude, de déprime, de filles, d’alcool, de misère, de mauvais coups et de mauvais garçons : le blues, pour les bien-pensants, est la musique du Diable. Peu à peu, de grands artistes émergent, dont certains vont devenir des légendes.

Aujourd’hui une multitude de musiciens, débutants ou virtuoses, n’a pas fini d’explorer ses gammes, ses trois accords et ses douze mesures : le blues est une forme polie par le temps comme un galet, dépouillée de tout sauf de l’essentiel, si épurée qu’elle semble éternelle.

Bernard Poupon
Mars 2005

Quelques disques essentiels :

Alan Lomax : The Land where the blues began (Rounder records)

Alan Lomax : Blues songbook (Harmonia mundi)

SON HOUSE -The Original delta blues (Legacy)

Charlie PATTON - Founder of the Delta Blues ( Yazoo)

Robert JOHNSON - The complete recordings (Sony Music)

J.B. LENOIR - Passionate blues (Bellaphon)

Blind Lemon JEFFERSON - Black snake moan (Wagram)

HOWLIN’ WOLF - I'm the wolf : Living the blues (Vogue)

Elmore JAMES - Person to person (Wagram)

LIGHTIN’ HOPKINS - Blues in my bottle (Warner)

Bessie SMITH - The Quintessence : The Empress 1923-1933 ( Frémeaux)

BIG MAMA THORNTON - Ball n’ chain (Arhoolie)

Muddy WATERS - Hard again (Sony Music)

John Lee HOOKER - The healer (Blue Rose)

B.B. KING - King of the Blues : 1949-1966 (MCA Records)

Albert COLLINS - Deluxe edition (Alligator)

Albert KING - I'wanna get funky (Stax)

Luther ALLISON - Reckless ( Ruf)

Ces compacts sont disponibles à la discothèque
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Pour en savoir plus :

Quelques livres essentiels :


Stéphane KOECHLIN – Le blues (Librio)

Paul OLIVER – Le monde du blues (10-18)

Gérard HERZHAFT – Encyclopédie du blues (Seghers)

Jean-Paul LEVET — Rire pour ne pas pleurer : le Noir dans l’Amérique blanche (Parenthèses)

LeRoi JONES — Le Peuple du blues : la musique noire dans l’Amérique blanche (Folio Gallimard


Quelques sites internet :

La Gazette de Greenwood
La Route du blues
The Blue highway
The Blues world

 
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Du blues au rap 2 : le gospel